Trois trios, Trois albums, Trois époques
Le 15 novembre 2019, Laurent de Wilde sort « Three Trios », un coffret de trois albums enregistrés en trio. « Odd & Blue » (1989) un album introuvable depuis vingt ans. « Open Changes » (1993) qui a reçu le Prix Django Reinhardt la même année. « The Present » (2006) épuisé depuis une décennie. Il est aisé de percevoir combien, entre 1989 et 2006, le pianiste a élargi le langage du trio traditionnel en incorporant compositions et acquis issus de ses autres aventures. Un voyage au fil des ans qui permet de saisir l’évolution de son art au sein du trio, piano-contrebasse-batterie.
Depuis trente ans Laurent de Wilde s’est exprimé dans différents contextes, électronique ou jazz. Certes c’est en quintet qu’il a enregistré son premier disque sous son nom « Off The Boat » en 1987 à New-York, mais le pianiste tourne ensuite autour du trio et revient toujours au format du trio piano-contrebasse- batterie..
Pour lui « Le triangle d’or, la seule figure géométrique dont les pointes se touchent entre elles, l’équilibre sacré entre le rythme, la mélodie et l’harmonie » et dans cette perspective, le 15 novembre 2019, Laurent de Wilde publie un coffret qui propose trois albums enregistrés par le pianiste en trio piano-contrebasse-batterie., « Three Trios » (Gazebo/L’Autre Distribution) avec :
- CD1 « Odd & Blue » (1989) avec Ira Coleman (contrebasse) & Jack DeJohnette (batterie)
- CD2 « Open Changes » (1993) avec Ira Coleman (contrebasse) & Billy Drummond (batterie)
- CD3 « The Present » (2006) avec Darryl Hall (contrebasse) & Laurent Robin (batterie)
« Three Trios ». Une rétrospective discographique qui donne à entendre comment le pianiste a évolué au sein du trio, configuration devenue référence incontournable du jazz… Trois Trios, Trois albums, Trois époques.
Trio piano-contrebasse-batterie
Laurent de Wilde l’écrit dans le livret du coffret « Three Trios », le trio… « c’est mon point d’équilibre, mon confort personnel, mon tabouret à trois pied, à l’aise sur toutes les pentes, mon petit chez moi à moi. »
La riche production d’albums du pianiste témoigne d’ailleurs de son intérêt pour le trio. En 2017, à l’occasion du centenaire de la naissance du pianiste et compositeur Thelonious Monk, Laurent de Wilde a sorti le superbe « New Monk Trio » auquel l’Académie du Jazz a décerné en 2017 le prix du « Meilleur disque français ». Ce même album où il joue avec Jérôme regard (contrebasse) et Donald Kontomanou (batterie) lui a valu d’être récompensé en 2018 du titre d’Artiste de l’Année dans le cadre des Victoires du Jazz et de recevoir la même année le Grand Prix Sacem.
A regarder attentivement la discographie du pianiste, on observe par ailleurs qu’en 2012 il a aussi sorti « Over The Clouds », un autre album enregistré en trio à Paris avec Ira Coleman (contrebasse) et Clarence Penn (batterie), un disque qui intègre à la tradition du trio jazz traditionnel « les formes, les mélodies, les matières musicales [qu’il a] vécues au cours de cette dernière décennie ».
En effet entre 2000 et 2012 Laurent de Wilde a sorti six albums de musique électronique parmi les lesquels « Organics » (2004) où il joue avec le saxophoniste Gael Horellou, le bassiste Philippe Bussonnet et le batteur Yoan Sera. On note par ailleurs que cet album est ressorti en 2011 dans un coffret où il est associé à « The Present », un album enregistré en trio jazz en 2006.
Chez le pianiste responsable du Label Gazebo, germe l’idée de jeter un regard rétrospectif sur ses productions discographiques en trio. Ainsi, il conçoit de rééditer deux de ses albums en trio jazz quasiment introuvables. « The Present », précédemment évoqué et aussi « Odd and Blue » introuvable depuis vingt ans. A ces deux opus il assoie « Open Changes » qui a reçu le prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz en 1993. Le projet devient réalité et Laurent de Wilde sort « Three trios », le coffret qui réunit ces trois albums gravés en trio.
« Three Trios »
Annoncé pour le 15 novembre 2019, le coffret « Three Trios » (Gazebo/L’Autre Distribution) réunit et ressuscite trois albums gravés en trio par Laurent de Wilde sous son nom. Cet évènement réjouissant permet d’accéder à des enregistrements quasiment introuvables.
D’abord « Odd & Blue » (1989) enregistré à New-York avec le contrebassiste Ira Coleman et le batteur Jack DeJohnette. Ensuite « Open Changes » (1993) gravé lui- aussi à New-York avec Ira Coleman que rejoint la batteur Billy Drummond. Enfin « The Present » (2006) capté à Paris avec le contrebassiste Darryl Hall et le batteur Laurent Robin.
Comme Laurent de Wilde le précise dans le livret, « La façon dont ces trios sont ordonnés ne dépend pas seulement de la chronologie de leur sortie, mais plutôt aussi de la chromologie de leurs pochettes : elles dérivent du bleu au jaune en passant par le gris et c’est joli comme ça. »
Une durée de plus de quinze ans séparent le premier du troisième trio ce qui permet de prendre la mesure de l’évolution de l’art du pianiste. Un voyage musical dans le temps et l’œuvre de ce pianiste qui a développé un style très personnel fondé sur la tradition et enrichi de ses expériences musicales. « Three Trios », trois Trios Jazz… du swing au groove.
« Odd & Blue » (1989)
Cet album a été enregistré par l’ingénieur du son Tom Mark les 25 et 26 juillet 1989, au nord de New York, du côté de Woodstock, dans une ancienne église en bois reconvertie en studio par Jack DeJohnette. C’est d’ailleurs le batteur lui-même qui est derrière fûts et cymbales pendant que la contrebasse est jouée de main de maître par Ira Coleman.
Laurent de Wilde s’inscrit dans la grande tradition du piano jazz malgré les mauvaises conditions d’enregistrement qu’il évoque dans le livret. En effet, les cordes du Steinway D changées la veille contraignaient à accorder le piano entre chaque prise et l’enregistrement réalisé « direct sur deux pistes » obligeait à tout reprendre en cas d’erreur. Pourtant, le professionnalisme et le talent de tous les protagonistes furent tels que l’écoute de « Odd & Blue » ne laisse rien percevoir de ces tracas techniques.
Les neuf plages révèlent un Laurent de Wilde inspiré. En verve et poussé par le jeu scintillant et bouillonnant de Jack DeJohnette à la batterie, le pianiste plaque des accords percussifs soutenu par Ira Coleman et ses solides lignes de basse. L’imperturbable basse assure un soutien indéfectible au piano et à la batterie qui dialoguent à bâtons rompus. Un trio isocèle.
Le répertoire de neuf titres compte cinq compositions personnelles du pianiste teintées de blues et gorgées de swing, Twilight, Oral loops, Brooding, Secret Plan et Spare changes. S’y ajoutent, Four in one (Thelonious Monk), The pleasure is mine (Herbie Hancock), House of jade (Wayne Shorter) et How deep is the ocean (Irving Berlin)…
On a de fait été saisi par l’écoute de la version de How deep is the ocean que dynamise le jeu pétillant de Laurent de Wilde soutenu par la basse inébranlable et propulsé par le jeu ardent, généreux et inventif de Jack Dejohnette.
« Open Changes » (1993)
Quatre ans plus tard, Laurent de Wilde enregistre ce disque à New-York, les 06 et 07 décembre 1992, dans le même studio et avec le même ingénieur du son David Baker que pour son opus « Colors of Manhattant ». Pour cette nouvelle collaboration entre le contrebassiste Ira Coleman et la batterie est confiée à Billy Drummond.
Enregistré sur un Steinway B dans le meilleur de sa forme et dans des conditions beaucoup plus confortables que « Odd & Blue », cet album fut le dernier disque que le pianiste a enregistré pour Philippe Vincent dont le label Ida Records a ensuite disparu. « Open Changes » a reçu le prix Django Reinhardt décerné par l’Académie du Jazz, laquelle prestigieuse récompense a ouvert quelques années plus tard les portes du label Sony à Laurent de Wilde.
Au fil des titres, on perçoit le bonheur de jouer du pianiste qui revitalise les standards. Relances/décélération, tensions/détente se succèdent. Au service du pianiste, la paire rythmique met en valeur le jeu serein et limpide du pianiste. Le trio équilatéral prodigue une musique fluide et apaisée.
Yack attack est la seule composition de Laurent de Wilde à figurer au répertoire de cet opus constitué essentiellement de standards. Parmi les dix reprises on retrouve entre autres deux morceaux de Monk, Off Minor et Jackie-Ing ainsi qu’une de Duke Ellington, Reflections in D,..
On a succombé à la superbe version que le trio donne de Reflections in D dont il fait ressortir la quintessence. Sur cette ballade, véritable éloge à la lenteur, la section rythmique d’une élégance subtile et d’une sobriété rare apporte son soutien au pianiste inspiré. Son jeu d’une beauté indicible fait vibrer les notes dans les aigus comme une trame de soie et magnifie la superbe composition du Duke.
« The Present » (2006)
Treize ans plus tard et après trois albums électro enregistrés chez Warner, il prend l’envie à Laurent de Wilde de renouer avec le trio jazz.
Le pianiste se lance donc un nouveau défi en trio acoustique avec l’album « The Present ». Il a été enregistré sur un Steinway D à Paris, au studio Acousti, les 21 et 22 février 2006 par l’ingénieur du son Dominique Poutet, alias Dume avec lequel le pianiste continue à travailler.
Laurent de Wilde se lance dans l’aventure avec Laurent Robin, le batteur déjà à ses côtés dans son sextet électrique sur l’album « Stories » gravé en 2003. Il s’adjoint par ailleurs la collaboration du contrebassiste américain Darryl Hall, installé en France depuis quelques années « dont le style de jeu et la musicalité complétaient parfaitement [s]a vision du trio ». On note que sur deux titres, la batterie passe aux mains d’un invité, Dion Parson.
Tout au long des huit plages du disque, le trio acoustique fait résonner une musique dont les atmosphères comblent l’oreille par leur diversité. Le climat musical se fait tour à tour funky, groovy, reggae, bluesy et parfois même techno. L’album se démarque des deux autres opus du coffret qui cultivent le swing à l’envi. Sur « The Present », la musique passe du swing au groove. L’opus inaugure et signe l’évolution du style que Laurent de Wilde va continuer ensuite à développer.
Hormis la reprise de Fleurette Africaine, un standard d’Ellington déjà enregistré quinze ans plus tôt sur « Colours of Manhattan », le répertoire compte des compositions issues du monde électronique du pianiste parmi lesquels entre autres The present, Move on, Quiet - Not Quite. Le passage de l’électronique à l’acoustique est réussi et fort innovant. Très personnels et colorés, les titres sont imprégnés d’une énergie rythmique inouïe qui dynamise la matière sonore.
Même si ça groove du début à la fin, on a succombé à l’écoute du titre Up and Down dont la pulsation drum’n bass illustre tout à fait la nouvelle conception du trio. Le morceau témoigne d’une expression très ouverte, avec une relative démesure ancrée dans la modernité du 21ème siècle. La section rythmique porte à la perfection l’énergie et le jeu renouvelé du pianiste.
« Three Trios », trois albums pour savourer l’évolution de l’art pianistique de Laurent de Wilde au sein du trio, piano-contrebasse-batterie. Sans renier la tradition dans laquelle il demeure ancré, ce voyage dans le temps témoigne du renouvellement de l’inspiration du pianiste et de sa capacité à se réinventer. Il a en effet incorporé dans son jeu et dans son écriture des formes, des mélodies et des textures issues de ses nombreuses et riches expériences musicales. Ce coffret porte l’empreinte d’un artiste sans cesse en questionnement et devenu un musicien de référence dans le jazz.
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