Abstraction subtile et respiration lumineuse
« Label ECM-Focus11 » continue l’exploration de l’esthétique singulière du label allemand. Avec le trio Belovèd, le pianiste britannique Django Bates enregistre en leader l’album « The Study of Touch ». Un opus étourdissant de musicalité et de subtilité.
Pianiste, corniste, compositeur et perturbateur musical, Django Bates est à l’honneur chez ECM en cette fin d’année 2017. L’album « The Study of the Touch » qui marque ses débuts comme leader chez ECM.
Sur cet opus splendide sorti le 03 novembre 2017, le pianiste britannique Django Bates revient à son trio Belovèd fondé pour la première fois en 2005 avec le bassiste suédois Petter Eldh et le batteur Danois Peter Bruun. Le disque a été enregistré à Oslo au Raindow Studio du 13 au 15 juin 2016 et produit par Manfred Eicher.
On a aussi tout récemment noté sa participation auprès de Dave Holland et Jack DeJohnette sur le dernier album du oudiste Anouar Brahem « Blue Maquams » sorti chez le 13 octobre 2017 chez ECM.
Django Bates a fait ses débuts chez ECM avec l’orchestre « First House » sur l’album « Erendira » gravé en 1985 puis sur « Cantilena » publié en 1989. Puis dans les années 90, il a enregistré avec le groupe de Sidsel Endresen sur « So I Write » paru en 1990 et sur « Exile » sorti en 1994.
Au cours de sa carrière, le pianiste britannique Django Bates a aussi enregistré en soliste en 1994 sur « Autumn Fires (and Green Shoots) » chez BMT, en duo avec Steve Argüelles, avec le quartet « Human Chain » aux côtés de Iain Ballamy aux saxophones, Michael Mondesir à la basse, Martin France à la batterie et avec en invitée la chanteuse Josefine Lindstrand.
Très récemment en 2017 on l’a retrouvé comme musicien/arrangeur/chef d’orchestre du Frankfurt Radio Big Band sur « Saluting Sgt Pepper ». En fait, le pianiste semble à l’aise dans tous les formats et tous les idiomes. Il demeure que c’est un plaisir sans égal d’écouter Django Bates sur le clavier d’un piano sans aucun effet.
En faisant de nouveau équipe avec Petter Eldh et Peter Bruun, le leader expose clairement les fondements de son trio. On se souvient les précédents albums enregistrés par le trio, « Beloved Bird » en 2010 et « Confirmation » en 2012, tous deux sous le label Lost Marble.Comme leurs titres l’indiquent, il s’agit d’hommages à Charlie Parker.
Sur « The Study of Touch », le titre Passport, jamais enregistré par le trio sur les précédents opus de Belovèd, fait référence à Charlie Parker et apparaît de la part du leader comme un clin d’oeil complice aux racines du groupe. mais aussi comme un au-revoir à Charlie Parker pour mieux réinscrire sa propre écriture au cœur même du trio.
A n’en pas douter, l’album « The Study of Touch » mérite bien son titre. Une musique accomplie et nuancée jouée par le trio Belovèd. Django Bates, Petter Eldh et Peter Bruun déroulent leurs spirales musicales aériennes sur onze titres qui s’enchaînent en un continuum savamment élaboré. Tout est délicatesse. Les touchers des trois instrumentistes se fondent en une alchimie subtile. La musique devient abstraction et l’on perçoit la respiration de l’infini.
Le thème Study of Touch qui donne son titre à l’album est une ballade très douce à la complexité désarmante. Sur ce morceau et aussi sur This World, Django Bates instaure un climat contemplatif. Par contre sur le plus énergique Giorgiantics la basse devient percussive, chante la mélodie et pousse le rythme ce qui permet à Bates de s’exprimer avec enthousiasme et de propulser la même énergie sur le dynamque Little Petherick.
A l’écoute de l’album on saisit vraiment la familiarité voire l’intimité qui lie les trois musiciens. C’est sans doute ce qui leur permet de reprendre certains des morceaux déjà enregistrés qui leur sont si familiers et de les renouveler, leur apporter de nouveaux sons, de nouvelles idées… et pour finir les doter d’un format qui convient tout à fait à l’identité du label ECM.
L’album ouvre avec Sadness All The Way Down déjà gravé sur l’album « Confirmation ». Partant de l’idée originale les musiciens explorent tous les possibles et se distancient du thème.Plusieurs autres pistes de l’album comme Senza bitterness, We are not lost, We are simply finding our way font en effet partie depuis longtemps des morceaux favoris du répertoire du trio Belovèd, mais chaque morceau semble renouvelé.
L’album se ressource vraiment dans le répertoire de « Confirmation » avec Peonies As Promised. Il précède le dernier titre de l’opus, Happiness all the way up qui, non sans humour, fait écho au premier morceau Sadness all the way down
Slippage Street, première pièce originale à avoir été écrite pour l’album, ne se démarque pas des textures et des formes familières à l’univers du Django Bates’s Belovèd même si son esthétique contrastée tranche avec l’atmosphère léchée du titre The Study of Touch.
« The Study of Touch ». Rêverie et mystère, intimité et douceur. Un pianiste impressionniste. Un batteur mélodiste. Un contrebassiste rompu au clair-obscur. La lumière tamisée de la musique se fond en mille nuances de teintes diffuses et crépusculaires et projette des camaïeux subtils de blanc, gris et noir.
A très bientôt dans une future chronique « Label ECM-Focus12 » pour explorer d’autres enregistrements du Label ECM.
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