Poésie musicale entre douceur et puissance
Pour le premier concert de son édition 2024, le Festival Jazz Campus en Clunisois 2024 donne rendez-vous au public le samedi 17 août 2024 au Farinier de l’Abbaye à 20h30. La chanteuse Laura Tedja, le pianiste François Raulin et le contrebassiste Pascal Berne proposent le projet « Black is the colour ». L’auditoire attentif vibrera de bout en bout à l’écoute du trio. La musique poétique balance entre douceur et puissance, entre introspection et véhémence.
Le 17 août 2024, c’est une soirée de poésie musicale qui ouvre le Festival Jazz Campus en Clunisois 2024. Sur la scène du Farinier de l’Abbaye sont réunis, deux maîtres de stage du festival 2024, Pascal Berne (contrebasse) qui anime « Intergalactic Session », en hommage à Sun Ra, et Laura Tejeda qui conduit « Lâcher de voix » et François Raulin (piano) qui a lui aussi assumé la fonction de maître de stage à Cluny lors de précédentes éditions.
La chanteuse de formation lyrique issue de l’ARFI, LauraTejeda, le contrebassiste Pascal Berne et le pianiste François Raulin, tous deux Membres du Collectif « La Forge - Compositeurs Improvisateurs Réunis », présentent « Black is the colour » créé le 04/04/24 au Quartier Latin Jazz Club de Vienne. Il s’agit du troisième concert de ce projet très singulier.
Le concert débute par une berceuse flamenca sur un texte de Federico García Lorca suivie par Introduction to people de Carla Bley terminé par un chant révolutionnaire chilien. Les ambiances évoluent entre véhémence et désespérance, vigueur percussive et douceur caressante. La voix aigüe égrène des mélopées où alternent onomatopées énergiques et souffles empreints de tendresse. Elle est soutenue par le piano percussif et les cordes de la contrebasse que l’archet caresse ou stimule.
Vient ensuite un morceau corse « avec des influences asiatiques ». Après un début très percussif amorcé par le piano, la voix explose dans les aigus et l’archet accentue la dimension asiatique de l’écriture. Alors qu’un oiseau vole au-dessus du public et des artistes, s’installe dans la musique une dimension introspective dans laquelle se termine la pièce.
Un riff de contrebasse répété à l’envi débute Lamamada, pièce du Moyen-Orient du XIIème siècle. La voix aigüe et suppliante se lamente puis piano et contrebasse dialoguent dans les médiums et graves. Très libre le piano improvise. Sur ses phrasés interrogatifs la voix se joint à lui. Après ce morceau, le trio continue avec un « saut dans le monde du lyrique ». Un morceau de Rossini arrangé par Laura Tejeda. Très véhémente elle chante debout et sa voix s’élève avec force… la voute du farinier en frémit de plaisir, tout autant que le public d’ailleurs.
Après ce très court morceau, le trio interprète un chant de Noël composé par Pascal Berne. « Mais qu’est-ce que tu dis…… » Laura Tejeda chante debout, le piano la rejoint, le débit s’accélère … « faut pas pousser la mémé dans les ronces ». L’ambiance se calme, la chanteuse s’assied et sa voix se pose doucement, piano et contrebasse dialoguent. Très discursif le pianiste stimule le contrebassiste qui frappe le bois de son instrument. La chanteuse se relève et sa voix comme exaspérée s’élève dans les aigus jusqu’au paroxysme… promesse d’un sacré Noël !
Vient ensuite Diaraby, un chant d’amour mandingue, morceau traditionnel de la musique d’Afrique de l’Ouest. Le pianiste a positionné des morceaux de bois sur les cordes de son instrument. Le morceau débute par un court solo de contrebasse, entre sons de cordes pincées et frappes manuelles sur le bois. Le piano percussif prend la parole, suivi par la voix qui entonne une plainte aigüe. Une grande liberté expressive caractérise l’interprétation de ce morceau.
Les trois musiciens assis chantent ensemble face au public et entament un thème traditionnel bulgare, très expressif dans lequel la voix explose. Le public très réceptif applaudit avec enthousiasme. Après ce morceau le trio dédie une composition à Alain Gibert (membre de l’ARFI et tromboniste décédé en 2013). Il s’agit de Réveillez-vous tous les endormis, une pièce traditionnelle du centre de la France « qui n’est pas une bourrée, … c’est un « réveillé », les gamins toquent à la porte des fermes et demandent une pièce pour la chance. La voix commence seule dans les aigus… « souvenez-vous qu’un jour il faudra mourir »… puis piano et contrebasse entrent dans la danse qui devient effrénée avant un apaisement final bienvenu.
Le répertoire continue avec Black is the Colour, une chanson irlandaise pleine de douceur et méditative voire introspective. Sur un tempo très lent, piano et contrebasse échangent dans un climat lyrique, les graves de la contrebasse évoquent la chute de larmes de tristesse.
Pour finir, le concert, le trio se tourne vers l’Italie. Tous trois artistes sifflent et la chanteuse s’accompagne d’une percussion posée sur ses genoux. Piano et contrebasse entament un rythme sautillant, celui d’une ronde effrénée à laquelle il fait envie de participer.
Pour répondre aux applaudissement fournis et enthousiastes du public, le trio revient et remercient Didier Levallet (directeur artistique) et toute l’équipe du Festival de Cluny. Ils invitent Étienne Roche (contrebasse, chant) à les rejoindre sur scène pour un dernier morceau. Autour du piano, les deux contrebassistes conversent, la voix de l’invité et celle de la chanteuse dialoguent. Après un moment évanescent, la musique se fait tempétueuse et s’élève avec véhémence vers les cieux.
Après ce voyage musical poétique à travers les chants du monde, vient le temps du retour à la réalité avec la musique de « Black is the colour » pour tapisser l’écran de la nuit.
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