Jazz vocal de haute voltige
Le quartet de jazz vocal américain, « The Royal Bopsters », dévoile « Party of Four » chez Motema Records. Composé d’Amy London, de la regrettée Holli Ross, de Pete McGuinness et de Dylan Pramuk, le groupe cisèle un joyau de l’art vocalese. Dans la lignée des fameux Lambert, Hendricks & Ross, des Manhattan Transfer et des Double Six, The Royal Bopsters présentent un album éblouissant. Accompagné d’un brillant trio piano-contrebasse-batterie, le quartet a invité Sheila Jordan, Bob Dorough et Christian McBride. Au cœur d’arrangements somptueux, les prouesses de ces quatre voix de haute voltige débordent de swing et de précision.
Après « The Royal Bopsters Project » sorti en 2015, The Royal Bopsters sont de retour avec « Party of Four », un deuxième album fort réussi dont la sortie est annoncée chez Motema Records. Sur leur premier album, The Royal Bopsters ont invité cinq légendes qui les ont inspirés : Mark Murphy (1932-2015), Bob Dorough (1923- 2018), Jon Hendricks (1921-2017), Annie Ross (1930-2020) et Sheila Jordan née en 1928 et toujours vaillante.
Pour leur deuxième album enregistré en juin 2017 et juin 2019, le quartet a de nouveau convié Sheila Jordan et invité Bob Dorough et Christian McBride.
« Party of Four » sort le 13 novembre 2020, trois jours avant la date qui aurait été celle du 64ème anniversaire de la chanteuse du groupe, Holli Ross et 5 jours avant celui de Sheila Jordan.
The Royal Bopsters
Le quartet vocal rassemble Amy London (soprano), Holli Ross (alto), Peter McGuinness (ténor) et Dylan Pramuk (basse). Tous les membres du groupe ont enseigné le jazz dans la région de New York et transmis ainsi leur connaissance et leur pratique du jazz vocal.
Les vocalistes de « The Royal Bopsters » mettent à mal la logique mathématique car leurs quatre voix additionnées n’en font qu’une, celle d’un groupe vocal qui contribue par son approche à rafraîchir le style vocalese. Utilisé pour la première fois par Leonard Feather en 1953, dans la revue Down Beat pour qualifier le style de la chanteuse Annie Ross, le terme vocalese désigne un genre de jazz vocal dont la tradition s’inscrit dans l’histoire du jazz. Il consiste à transcrire des solos d’instrumentistes pour la voix. Aux États-Unis, ce sont le chanteur Eddie Jefferson (1918-1979) puis les groupes de Lambert, Hendricks & Ross (1958-1962) et Manhattan Transfer (fin années 70, début années 80) qui ont popularisé l’art vocalese. En France, Mimi Perrin et les Double-Six (1959-1966) ont représenté avec brio ce style de jazz vocal.
L’écoute de « Party of Four » prouve dès les premières mesures de la première piste combien The Royal Bopsters maîtrisent le jazz vocal de style vocalese. Leurs voix de haute voltige développent des prouesses de swing valorisées par des arrangements éclatants.
Groupe instrumental et invités
Sur l’album « Party of Four », dédié à Holli Ross décédée en juillet 2020, le quartet vocal The Royal Bopsters est accompagné par un trio instrumental composé du pianiste Steve Schmidt piano, du batteur Steve Williams et du contrebassiste Cameron Brown qui cède l’instrument à Christian McBride sur deux titres. Le percussionniste Steven Kroon intervient lui aussi à leurs côtés sur deux morceaux.
Sur Lucky To Be Me, la toujours jeune Sheila Jordan qui a chanté le bop avec Charlie Parker rejoint The Royal Bopsters et retrouve Cameron Brown avec qui elle a souvent partagé la scène et même gravé des albums. Le regretté Bob Dorough (1923-2018) a chanté avec The Royal Bopsters sa composition Baby, You Should Know It, sur ce qui compte sans doute parmi un de ses derniers enregistrements.
Les brillants arrangements sont à porter au crédit de Dylan Pramuk, Peter McGuinness et Steve Schmidt.
Au fil des plages
L’album ouvre avec l’entraînant But not For Me, ce thème de Gershwin qu’affectionnait Chet Baker. Avec agilité et précision, les voix reprennent d’ailleurs un solo scat de Chet Baker harmonisé pour l’ensemble par McGuinness. Le morceau permet aussi d’apprécier un solo swinguant et savoureux du pianiste Steve Schmidt. Le répertoire se poursuit avec le medley On A Misty Night/The Gipsy. Amy London chante la mélodie avec passion et le contrebassiste invité, Christian McBride, offre un solo aussi lumineux que puissant. Sur des arrangements de Dylan Pramuk, les voix des Royal Bopsters sonnent comme les instruments d’un big band qui ponctueraient le rythme derrière la basse. On demeure confondu par la précision de l’orchestration.
Le groupe enchaîne avec la tendre ballade How I Love You (Let me count the reasons) dont les paroles et arrangements ont été à l’origine écrits par Dylan Pramuk à l’occasion de son mariage. C’est d’ailleurs lui dont la voix est mise en valeur sur ce titre. La chanson est basée sur une improvisation de Dexter Gordon. Plus loin, Lucky To Be Me met en avant Sheila Jordan. Après le couplet introductif des Royal Bopsters, Sheila Jordan et Cameron Brown exposent la mélodie puis la chanteuse entame un scat sublime de douceur et de retenue.
Sur Why’d You Do Me the Way You Did ? Amy London a ajouté des paroles à celles de Mark Murphy. La chanteuse clame son blues avec véhémence pour narrer une histoire d’amour ratée et les notes bleues voltigent au-dessus du clavier du pianiste, arrangeur du morceau. La ballade de Billy Strayhorn, Day Dream, ménage ensuite un intermède en suspension que le quartet chante a capella. Ce titre, interprété par les voix sans aucun accompagnement, brille par sa mélancolie un peu décalée par rapport au reste du répertoire. Un joyau vocal absolu !
Le contraste est grand avec le morceau suivant, Cuando Te Vea (When I see you), un mambo de Tito Puente, arrangé par Dylan Pramuk. Sur un rythme de salsa, Holly Ross chante les paroles qu’elle a écrites. Outre l’efficace intervention de la contrebasse de Christian McBride et la présence du percussionniste Steve Kroon, McGuinness offre un remarquable solo de « trombone à la bouche ». Le répertoire se poursuit avec un morceau de Bob Dorough, Baby, You Should Know It, sur lequel le chanteur rejoint le quartet. L’atmosphère se fait bluesy et restitue le rire et la voix pétillante et expressive de Bob Dorough.
Place ensuite à Our Spring Song, une composition de Pete McGuinness qu’il a arrangée pour le groupe sur des paroles d’Amy London. Le morceau se distingue par un swing chaleureux et les prouesses des voix qui développent un solo de groupe chatoyant. Le défi est grand pour les Bopsters sur Rusty Dusty Blues de Mayo Williams, basé sur l’improvisation du groupe de Count Basie. En effet, ce titre fut interprété entre autres chanteurs par Jon Hendricks avec Dave Lambert et Annie Ross. Dylan Pramuk qui a conçu les arrangements, pose avec détermination son chant bluesy sur les paroles de Jon Hendricks.
Une force mystérieuse et une émotion sensible caractérisent l’interprétation que donnent The Royal Bopsters de la composition de Wayne Shorter, Infant Eyes. Sur des arrangements de Pete McGuinnes et des paroles de Doug Carn, c’est un chorus du saxophoniste Wayne Shorter issu de l’enregistrement original qui est repris par le groupe. Le solo solaire et inspiré du pianiste ajoute au mystère et à la douceur du morceau. L’album se termine avec My Shining Hour arrangé par Peter McGuinness. Le scat qu’il développe est remarquable de souplesse, d’inventivité et de clarté sur le tempo rapide du morceau. On est proche de la jubilation !
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