Exploration poétique et lyrisme brûlant
« Avec Le Temps »… la chanson de Léo Ferré inspire le pianiste italien Giovanni Guidi qui intitule ainsi son troisième opus en leader chez ECM. L’album ouvre d’ailleurs avec le titre dont il propose une version sensible et poétique interprétée en trio avec le contrebassiste Thomas Morgan et le batteur João Lobo. En trio ou en quintet, Giovanni Guidi captive par ses mélodies épurées, ses explorations sonores et ses propos enflammés.
Giovanni Guidi fait partie de cette nouvelle garde des pianistes-compositeurs du jazz italien et depuis 2007 où son talent a été repéré, le musicien creuse son sillon et explore un univers très personnel qui accueille tour à tour une poésie musicale épurée, un lyrisme brûlant et de superbes explorations sonores.
Après « City of Broken Dreams » (2013) et « This is the Day » (2015) parus en trio chez ECM, le 22 mars 2019, le pianiste Giovanni Guidi sort « Avec le Temps », son troisième album en leader sous le label allemand. Avec deux titres interprétés avec le contrebassiste Thomas Morgan et le batteur João Lobo, il continue à développer sa conception du trio piano-contrebasse-batterie mais élargit son expression en quintet en accueillant le saxophoniste Francesco Bearzatti et le guitariste Roberto Cecchetto.
Au fil de l’album l’approche mélodique captive tout autant que les échappées libres que proposent le pianiste et ses compagnons dans des compositions collectives aux improvisations très libres. Prétextes à des excursions d’un monde sonore très personnel, ces digressions sont autant de pirouettes exploratrices qui élaborent une trame musicale imprévisible d’une richesse et d’une force inouïes. La musique alterne entre poésie épurée et brûlot passionné.
Giovanni Guidi
Né en Italie à Foligno, près de Pérouse, en 1985, Giovanni Guidi a commencé le piano à l’âge de 12 ans et a été d’abord remarqué et encouragé dans ses orientations musicales par Enrico Rava, lors de master classes d’été organisées à Sienne. En 2007, il remporte le Prix des Critiques du magazine Musica Jazz dans la catégorie Jeune Talent.
Après avoir commencé sous l’aile du trompettiste italien Enrico Rava, Giovanni Guidi a ensuite enregistré avec lui en 2011 sur “Tribe“ (ECM) au sein du Rava Quintet et un an plus tard sur “On The dance Floor“ (ECM), en compagnie du groupe Parco della Musica Jazz Lab. Outre ces expériences enrichissantes il creuse parallèlement son propre sillon.
Ainsi, après avoir enregistré sous le label japonais Venus, il grave quatre albums sous son nom pour Cam Jazz. « Indian Summer » (2007), « The House Behind This One » (2008) et « The Unknown » Rebel Band » (2009) où le batteur João Lobo est déjà à ses côtés. Il enregistre ensuite « We Don’t Live Here Anymore » en 2011 où joue le contrebassiste Thomas Morgan.
Repéré par Manfreid Eicher, il sort en 2013 « City of Broken Dreams », un premier album en trio en tant que leader chez ECM. Il continue avec le même trio constitué de Thomas Morgan (contrebasse) et João Lobo (batterie) et en 2015 publie « This is the Day » (ECM). On l’a aussi remarqué en 2016 sur Ida Lupino aux côtés de Gianluca Petrella, Gerald Cleaver et Louis Sclavis, opus qui a été nommé album jazz de l’année dans Musica Jazz.
Sur scène il a aussi participé à la tournée 2017 du quintet d’Enrico Rava &Tomasz Stanko. Les années passent et le jeune pianiste confirme ses qualités et son talent et continue à mener sa carrière avec brio. En témoigne son troisième album, « Avec Le Temps » (ECM/Universal), enregistré aux Studios La Buissonne à Pernes-les-Fontaines en novembre 2017 et produit par Manfred Eicher.
« Avec Le Temps »
Pointilliste et mélancolique, poétique et aérienne la musique introspective de Giovanni Guidi engage à la méditation mais n’hésite pas pour autant à emprunter des détours enflammés dont les soubresauts explorent librement l’espace sonore. Ainsi l’album propose huit titres qui s’inscrivent entre méditation crépusculaire et soubresauts dynamiques.
Deux titres en trio
L’album ouvre en trio avec une version touchante de la chanson de Léo Ferré (1916-1993), qui donne son titre à l’album. L’hommage à Ferré qui a longtemps vécu en Toscane, propose une atmosphère recueillie et sensible qui suspend le temps. Les instruments chantent littéralement, la contrebasse étire les notes, le piano cisèle les notes, la batterie fait pleurer les cymbales.
L’opus se termine avec Tomasz, un hommage rendu à Tomasz Stanko (1942-2018). La mélodie nostalgique est au trompettiste récemment décédé à l’âge de 76 ans. Les notes perlées du piano, l’expression subtile de la contrebasse et le jeu feuilleté des balais sur la batterie restituent un climat d’une sensibilité rare qui n’est pas sans rappeler celle du trompettiste qu’elle honore.
Six pièces en quintet
Compositions collectives
Commencé sur un tempo rubato PostLudium And A Kiss fait naître une tension explosive insufflée par les divagations sonores du saxophone explorateur du son qui mène la transe jusqu’à un feu d’artifice final auquel les cinq instrumentistes apportent leur flamme. No Taxi évoque l’univers d’Ornette Coleman et permet d’écouter un piano libéré de toute contrainte.
Compositions de Giovanni Guidi
Le jeu symbiotique de la guitare et du saxophone contribuent à insuffler une forme de spiritualité à 15th of August qui prend la forme d’une imploration musicale bluesy. La sonorité embrumée du ténor crée un climat onirique sur Caino, ballade où le piano délivre des arpèges dont les dissonances croisent les voluptueuses lignes de la contrebasse. La trame musicale se tisse et se détend dans un bain sonore soigné. Minimaliste, Johnny The Liar génère une atmosphère lunaire où guitare et piano échangent des impressions fugitives.
Sur une rythmique très souple, guitare et piano chantent tour à tour la mélodie angélique de Ti Stimo. Dans un troisième mouvement, le ténor rejoint la guitare et tous deux croisent leurs envolées lyriques portées par la batterie au jeu très libre. La douce berceuse se termine en une déclaration admirative imprégnée d’une subtile tendresse.
« Avec Le Temps » fascine par sa variation coloriste et la densité des paysages proposés. Empreinte d’une conviction profonde, l’expression musicale fait alterner une poétique aérienne aux entrelacs d’une légèreté impalpable et des climats brûlants de liberté et de lyrisme. Un album inspiré où la mélodie prend quelquefois la tangente pour distendre les rythmes et engendrer des tensions palpables. L’univers de Giovanni Guidi n’en finit pas de surprendre et de convaincre.
Titi Robin Quatuor présente « Le Sable et l’Écume »
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